De l’Éthique dans la résistance, ou comment cheminer avec Mahmoud Darwich du chaos à la nouvelle Andalousie
par François Xavier
Résumé
Nous sommes en avril 1988. Voilà quatre mois que l’Intifada – la Révolution des pierres – s’est emparée des Territoires occupés. Paraît alors un poème de Mahmoud Darwich.
Un simple poème qui va déclencher une tempête politique. Un simple poème qui va déstabiliser le gouvernement israélien bien plus que ne l’aurait fait une série d’attentats ou une victoire militaire. Oui, un simple poème que le Premier ministre israélien, Ytzhak Shamir, dénoncera à la tribune de la Knesset dans un aparté d’une rare violence. Mais le 30 octobre 1991 s’ouvre la Conférence de Madrid, la toute première fois que des diplomates palestiniens et israéliens se retrouvent autour d’une même table. De là à penser que ce poème y est pour quelque chose
Mais pourquoi ce poème et pas un autre ? Sans doute parce qu’il a trouvé les justes paroles. Sans doute parce que c’est Darwich qui l’a écrit. Porté aux nues depuis déjà deux décennies par tout le monde arabe, et pas seulement les Palestiniens, Darwich incarne l’utopie politique dont rêvent des millions d’êtres humains, de l’Euphrate à la côte Atlantique notamment. N’ayant jamais fléchi, n’ayant jamais baissé l’échine, Darwich, depuis « Écris, je suis arabe », transpose l’âme sémite au-delà des frontières et permet aux esprits de s’éclairer d’une autre réalité que celle imposée sempiternellement par voies de mass médias occidentaux.
Inscrivant son œuvre dans une éthique de la résistance, il reconnaîtra le supplice juif et l’existence d’Israël mais n’aura de cesse de combattre l’obscurantisme aliéné d’une politique sioniste qui le nie. Brisé jusque dans sa chair par ce mur invisible qui lui refusera l’amour, il appellera de ses vœux à une nouvelle Andalousie, à la création d’un état binational où un homme serait l’égal de l’autre sans distinction de religion… Sa parole libérée aura permis au monde d’évoluer vers une autre direction. Mais le plus dur reste à accomplir.